En théologie voyez-vous, rien n'est compliqué. C'est en tension. Parfois aussi, c'est profilé. Voilà pourquoi un théologien commence à se frotter les mains quand on commence à le titiller avec des gros mots comme "tradition" ou "communauté". A fortiori quand c'est lui qui les a choisis, les gros mots (on n'est jamais aussi bien servi que par soi-même). Ce soir donc, nous parlions au cours public de communauté et de traduction. Pardon, de tradition. Mais en fait, c'est pareil, ou c'est proche. Parce qu'il n'y a de tradition que trahissant le message qu'elle transmet. La tradition n'est pas reprise à l'identique de ce qui est transmis : il y a forcément, toujours, un écart. Ce que dira un théologien protestant, c'est qu'il faut donner une juste place à tous les éléments de la transmission : tradition, Ecriture et autorité. En d'autres termes, il faut veiller à ce que l'Evangile à transmettre ne soit pas emprisonné par la tradition, qu'il puisse rester une instance radicalement critique, y compris et peut-être surtout de la tradition.
Mais alors, la tradition et l'Eglise, quel rapport ? Un rapport tout à fait essentiel. Mais paradoxal. Dans les confessions anciennes, l’Eglise est confessée : c’est ce qu’il faut croire. Que la foi concerne Dieu, bon, ok. Le Fils, soit. Le Saint-Esprit, va encore. Mais l’Eglise ? Pourquoi faut-il qu’elle soit prise dans le mouvement du croire ? Au même titre que Dieu, Père, Fils et Esprit ? L'Eglise comme corps du Christ, on veut bien y croire -- mais personne n’a jamais songé à en faire une nature divine de même nature que le père, le fils et l’esprit (certes, il y a dans le catholicisme une façon d'évoquer le corps mystique du Christ qui peut s'en approcher).
Alors c'est quoi, l'Eglise, à la fin ? L'Eglise, c'est une communauté. Or ce qui fait communauté, c'est ce qu'on a en commun ; mais ce qu'on a en commun en Eglise, c'est l'absence du Christ, donc ce qu'on n'a pas. Aujourd'hui, tout nous pousse à croire que c'est d'avoir quelque chose en commun qui nous permet d'être ensemble ; c'est ce qu'on recherche à tout prix ces temps-ci, se rassembler pour trouver en quoi on dit des choses semblables. Mais non, justement. Fondamentalement, l'absence du Christ, c'est ce qu'on a en commun.
C'est là que la compréhension que les Réformateurs avaient de l'Eglise est importante. Ils précisaient qu'il était impossible de savoir qui, en vérité, fait partie de l'Eglise : il y a des croyants à l'extérieur de l'Eglise et il y a des faux croyants dans l'Eglise. Et alors ? alors, seul Dieu peut en juger. C'est le sens de la communion des saints : elle nous situe dans quelque chose de plus vaste que ce que l'on peut en juger. Seul, il m'est impossible de savoir d'où me vient ce dont je suis au bénéfice. La communion des saints, c'est aussi être au bénéfice de la foi des autres.
Alors pourquoi faut-il qu'il y ait une Eglise visible ? L'Eglise n'est pas une assemblée ordinaire : c'est l'assemblée de ceux qui sont appelés par la parole de Dieu, par le Christ, établis par le Christ pour être son corps. Mais comme on le disait plus haut, c'est un corps qui n'a pas toute sa tête ! Ce corps témoigne de la présence paradoxale du Christ dans le monde. Imparfaite, limitée, jamais égale à l'Eglise invisible, l'Eglise visible est le lieu de l'unité. Cette unité ne nous appartient pas, elle ne procède pas de nous : elle fait altérité avec ce que nous vivons dans le monde. L'unité ne peut que faire irruption comme une grâce — pas par l'effort que nous pouvons faire, mais dans le partage de la parole et du pain. Il faut croire à l'Eglise... parce qu'on ne peut croire qu'en ce qu'on ne voit pas...
Alors c'est quoi, l'Eglise, à la fin ? L'Eglise, c'est une communauté. Or ce qui fait communauté, c'est ce qu'on a en commun ; mais ce qu'on a en commun en Eglise, c'est l'absence du Christ, donc ce qu'on n'a pas. Aujourd'hui, tout nous pousse à croire que c'est d'avoir quelque chose en commun qui nous permet d'être ensemble ; c'est ce qu'on recherche à tout prix ces temps-ci, se rassembler pour trouver en quoi on dit des choses semblables. Mais non, justement. Fondamentalement, l'absence du Christ, c'est ce qu'on a en commun.
C'est là que la compréhension que les Réformateurs avaient de l'Eglise est importante. Ils précisaient qu'il était impossible de savoir qui, en vérité, fait partie de l'Eglise : il y a des croyants à l'extérieur de l'Eglise et il y a des faux croyants dans l'Eglise. Et alors ? alors, seul Dieu peut en juger. C'est le sens de la communion des saints : elle nous situe dans quelque chose de plus vaste que ce que l'on peut en juger. Seul, il m'est impossible de savoir d'où me vient ce dont je suis au bénéfice. La communion des saints, c'est aussi être au bénéfice de la foi des autres.
Alors pourquoi faut-il qu'il y ait une Eglise visible ? L'Eglise n'est pas une assemblée ordinaire : c'est l'assemblée de ceux qui sont appelés par la parole de Dieu, par le Christ, établis par le Christ pour être son corps. Mais comme on le disait plus haut, c'est un corps qui n'a pas toute sa tête ! Ce corps témoigne de la présence paradoxale du Christ dans le monde. Imparfaite, limitée, jamais égale à l'Eglise invisible, l'Eglise visible est le lieu de l'unité. Cette unité ne nous appartient pas, elle ne procède pas de nous : elle fait altérité avec ce que nous vivons dans le monde. L'unité ne peut que faire irruption comme une grâce — pas par l'effort que nous pouvons faire, mais dans le partage de la parole et du pain. Il faut croire à l'Eglise... parce qu'on ne peut croire qu'en ce qu'on ne voit pas...