Pour
dire vrai, il me semble que ce sont les discussions qui ont cours au
Comité Central qui me donnent ce ressenti. Quand nous en rediscutons
entre stewards, j'ai l'impression de ne pas être toujours sur la
même longueur d'ondes que certains d'entre eux (peut être même la
plupart d'entre eux). Alors bien sûr, la pensée unique n'est pas
une panacée, bien au contraire, mais à bien y réfléchir (je
réfléchis tout en écrivant), j'éprouve une sensation de déjà
vu.
Certains
sont surpris que la gouvernance d'une institution telle que le COE se
fasse au prix de consensus longs et délicats à obtenir, et que les
différentes confessions réunies ne soient toujours pas arrivées à
s'entendre sur des points aussi théoriquement simples que pouvoir
donner une définition commune de ce qu'est l'unité, ou encore
pouvoir s'entendre sur le statut à accorder à la mission.
Mais
dans notre Eglise, notre ecclésiologie exigeante nous habitue à ces
processus décisionnaires faits de débats, de consensus (de
votations également). Alors, non je ne suis pas surpris, mais je
sens que je ne me situe pas de la même manière que la plupart des
stewards.
En
creusant un peu la question, je crois que le steward dont je me sens
le plus proche d'un point de vue théologique et ecclésiologique est
un étudiant en théologie, de confession orthodoxe. Il a appris que
le représentant de son Eglise s'était défaussé, et qu'il avait
envoyé une personne qui ne connaissait que peu des problématiques
au niveau de l'oecuménisme, et qui, qui plus est, n'a pas assisté
aux réunions par régions. Or lors de ces réunions, les régions
décident de demander formellement certaines choses en leur faveur :
avoir davantage de membre, proposer des personnes pour les fonctions
de gouvernance du COE, décider de la répartition des membres par
région confession par confession... Cet étudiant était donc très
frustré de voir que son Eglise avait confié cette tâche à une
personne qui n'était pas du tout investie dans l'oecuménisme et qui
ne faisait dès lors qu'acte de présence (et encore...). Mais il
s'est heurté à l'ecclésiologie de son Eglise qui, bien que n'étant
pas aussi clairement hiérarchisée que celle de l'Eglise catholique,
l'est tout de même un peu. Il n'était dès lors pas possible pour
lui de parler de ceci aux autres églises orthodoxes présentes...Et
en en rediscutant avec lui, j'ai senti qu'il avait à cœur de
pouvoir s'investir dans son Eglise, mais que s'il ne pouvait pas le
faire, si on l'en empêchait d'une manière ou d'une autre, il s'en
irait dans une autre Eglise pour servir ce qu'il croit être juste.
C'est peut-être aussi ça l'oecuménisme : être prend à
prendre conscience des faiblesses de son église, en regardant le
fonctionnement des autres églises, et être capable d'admettre que
tout n'est pas parfait.
Aucune
ecclésiologie n'est parfaite, puisque toutes sont d'essence humaine,
même si elles prennent appui sur des données scripturaires.
L'église comme communauté ne doit donc pas être une fin en soi,
mais bien un moyen offert aux croyants de pouvoir échanger et vivre
ce que le Seigneur nous offre de vivre en sa présence.
Quant
à la journée de samedi (jour 9), elle fut relativement tranquille
du point de vue du travail à fournir en tant que steward. Nous
avions l'opportunité de prendre un peu de repos, et de participer à
une réunion sur la question du dialogue inter-religieux du point de
vue du COE. La personne qui nous accueillait nous a brossé à grands
traits le cheminement qui a conduit le COE à mettre en place une
structure dédiée à cette question, structure qui produit notamment
deux fois par an une revue sur la question (la revue s'intitule
Current Dialogue).
Cette
personne nous a expliqué que de son point de vue, et du point de vue
du COE, il existe quatre possibilités d'instaurer un dialogue entre
différentes religions :
- dialogue de vie : qui a cours essentiellement dans les pays où toutes les religions se côtoient au cours de la vie quotidienne, et qui tire justement son essence dans la vie quotidienne ;
- dialogue du travail : lorsque des personnes de religions différentes travaillent ensemble, les conditions d'un dialogue inter-religieux peuvent être réunies ;
- Le dialogue théologique : celui qu'elle appelle des experts, et qui est pour elle un dialogue d'intellectuels ;
- le dialogue des expériences spirituelles : dialogue entre des personnes croyantes, qui peut avoir lieu et qui doit s'expérimenter de deux façons : dialogue en face à face, et dialogue côte à côte. L'idée est de ne pas se contenter d'un dialogue en surface, qui se limiterait à une coopération en matière sociale (ce qui entre nous est déjà un bon début!) , mais de parvenir à un dialogue théologique plus profond, pour aborder les questions qui divisent (je ne sais pas comment elle comptait parvenir à surmonter les divergences inévitables entre les religions, mais je n'ai pas eu l'occasion de lui poser la question).
L'intérêt
du dialogue inter-religieux selon elle, ne se limite pas à un
intérêt de connaissance à propos des autres religions, mais
présente aussi un intérêt réel et certain quant à la formulation
de notre foi.
En
réaction à ce que nous entendons, nous pouvons dire ce que nous
croyons. C'est en somme un peu dans le même esprit que le dialogue
oecuménique fonctionne, même si a priori, davantage de
points communs nous unissent.
La
deuxième réunion à laquelle j'ai assisté ce samedi fut celle des
confessionnal meetings : il s'agit pour chaque confession
de réunir l'ensemble de ses membres présents et de discuter des
problématiques à faire émerger pour les Comités centraux à
venir, mais aussi en l'occurrence pour l'assemblée générale du COE
qui aura lieu l'année prochaine à Busan en Corée du Sud.
J'avais
l'opportunité de me rendre à plusieurs réunions : celle des
réformés/presbytériens, celle des luthériens (étant donné que
nous allons être très bientôt unis), et celle des Eglises unies.
J'ai opté pour la première solution mon badge indiquant que je fais
partie de l'Eglise Réformée de France.
Le
dialogue fut très apaisé, et aucune question ecclésiologique
abordée, si ce n'est celle du rôle prophétique du COE et des
églises. L'idée n'est en fait pas d'échanger et de débattre sur
des différences théologiques ou ecclésiologiques, mais bien
d'essayer de faire avancer ensemble le projet qu'est le COE, et
d'arriver à mettre en place davantage d'unité et de communion entre
les confessions. L'idée a donc été lancée qu'un service de la
Cène soit mis en place, et que chacun puisse y prendre part.
Evidemment, en proposant cela, nous savons pertinemment que les
orthodoxes et les membres de l'Eglise Vieille Catholique ne pourront
pas y prendre part, mais il nous semblait important de pouvoir
initier une dynamique en vue de l'AG de Busan l'année prochaine.
C'est peut-être par des actions concrètes que les décisions
solennelles peuvent évoluer.
En
tout cas, cette journée fut très enrichissante pour ma part, et
j'ai beaucoup apprécié pouvoir prendre part à ces réunions, en
tant que participant, et pas seulement en tant que steward, au
service.
Car
en fin de compte, participer au processus décisionnaire, c'est aussi
rendre une forme de service aux Eglises qui nous envoie !
Au fait, vous devez vous demander ce que signifie le titre de mon billet : il s'agit d'une abréviation très utilisée par les membres du COE : AOB signifie any other business ?
Alors, rien à ajouter ?
1 commentaire:
Merci cher Steward pour vos messages auxquels j'adhère et d'ailleurs, auxquels je me suis collé le temps de lire toute cette prose très intéressante. Certes j'adhère et m'y suis collé, toutefois, bien évidemment, je ne voudrais point revêtir un uniforme... (théologique ou autre!). Mais donc, merci pour le partage de cette expérience oecuménique!
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