Voyager
permet de lire et de réfléchir. Le jour va venir où je consacrerai
un billet entier à un éloge du TGV Paris - Montpellier. En toute
sincérité, c’est un de mes lieux préférés en France.
C’est
donc dans ce train que je viens de lire un magazine qui s’appelle
« TGV Magazine ». Bref, un pseudo-glossy avec zéro prétention,
mais pourtant, je suis tombé sur deux articles qui m’ont troublé.
Moi, qui me définit, selon les jours, comme « pas très croyant
» ou simplement « protestant libéral ». Car justement,
c’est de liberté et de religion qu’on parle.
Ça
commence avec un entretien avec Marjane Satrapi, artiste et cinéaste
franco-iranienne. On lui pose la question : « D’où vous
vient votre esprit libre ? » Réponse hallucinante : «
J’ai eu une éducation totalement en dehors de religion. J’ai
été élevée par des gens qui ont su développer chez moi un sens
éthique - pas un sens moral - et qui m’ont toujours poussée à
avoir une pensée personnelle. »
D’accord,
l’Iran n’est pas le pays modèle où religion et liberté vont
main dans la main. Mais ce qui m’énerve, c’est que – si on
suit cette argumentation – les croyants sont a priori définis
comme des moutons sans trop de pensées personnelles. Sans pour
autant vouloir fermer mes yeux sur les dérives, et avec le tout
petit peu de foi qui est le mien, je revendique une force libératrice
et émancipatrice que la religion peut apporter aussi. Et je suis
obligé de défendre cette affirmation, car j’avoue qu’elle a
souvent besoin de pédagogie pour être bien comprise...
On
tourne la page du magazine pour trouver un entretien avec Sophia
Aram, comédienne et chroniqueuse sur France Inter, que j’apprécie
beaucoup. Mais avec toute l’estime et le respect que je lui dois :
on continue les bêtises ! Je cite : « En tout cas, on
peut être sûr que Dieu n’est pas une femme. (...) Les
trois grandes religions monothéistes n’arrivent pas à se mettre
d’accord sur grand-chose. À part la place de la femme dans la
religion... et l’homosexualité ! »
N’importe
quoi, chère Sophia ! Vous l’aurez compris, j’ai quitté le
TGV un peu déprimé. C’est pas comme ça qu’on va faire avancer
les débats.
Heureusement,
il y a aussi des petites merveilles pour retrouver le courage.
Dépêchez-vous pour aller voir au cinéma le film Wadjda,
premier film saoudien qui est réalisée par une femme, Haifaa
Al-Mansour. Toutes ces grandes questions compliquées de liberté et
de religion abordées par le prisme d’une petite histoire très
fine. Synopsis : Wadjda, une fille de dix ans, rêve d’avoir
un vélo, mais en Arabie Saoudite ce n’est pas permis aux filles de
faire du vélo... Grâce a sa finesse et sa luminosité, ça donne un
film puissant, qui invite à penser plus loin que le simple constat
que les femmes en Arabie Saoudite sont opprimées. Le film traite la
religion avec beaucoup de respect, ce qui n’empêche pas une prise
de position claire : c’est la liberté, et pas la soumission,
qui aura le dernier mot.
Fabian
Keijzer
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