C’est
quoi, l’inspiration ? Et est-ce que ça existe vraiment ? « Je
ne crois pas au mythe de l’inspiration » disait le chanteur
Nick Cave récemment aux Inrockuptibles : « c’est très
surestimé. Il y a parfois des révélations, mais sans travail
derrière elles ne servent à rien. »
J’ai
lu cet interview avec approbation. Oui, je l’avoue, je suis un
petit-fils de ma grand-mère qui, même à 93 ans, reste une
workaholic. La création demande du taf ! De temps en temps ,
c’est bien de démystifier les choses. Si on veut être créatif,
forcément ça veut dire qu’on doit bosser. Il faut sortir de notre
‘paresse naturelle’ : l’inspiration c’est quelque chose à
chercher activement. C’est pourquoi chaque matin Nick Cave dit à
sa femme : « Je vais au bureau ! » avant de se mettre à
écrire de la musique.
En
même temps, j’ai du mal à croire que travailler seulement suffit
à créer des belles choses. Mes propres expériences, aussi banales
soient-elles, m’obligent quand même à croire à ce que Nick Cave
appelle des ‘révélations’. Ça m’est arrivé en rédigeant
des textes, que ce soit un plaidoyer en tant qu’avocat, ou que ce
soit une prédication en tant que théologien.
Écrire,
ça commence pour moi avec lire. Je cherche le silence pour lire dans
tous les sens, jusqu’au moment où il y a des mots qui entrent, qui
me touchent. Là, je commence à me poser des questions. Pourquoi ça
me touche ? Quel intérêt ? Quels échos ça donne ? Je laisse
mijoter les mots, je mâche mes mots, si vous voulez. Et j’attends,
sans trop attendre, s’il y a quelque chose qui me dépasse, qui se
crée et qui crie - pour rompre le silence.
Il
y un lien invisible entre lire et écrire. C’est le lien
indissociable entre créer et être créé. Et c’est dans ce
domaine-là que se trouve l’inspiration. J’ai connu une
bibliothèque où il y avait un avertissement à l’entrée : «
Prenez garde, de ne pas vous faire dévorer par les livres ! »
Effectivement, créer c’est chercher activement l’inspiration et
la subir ensuite. L’initiative est à moi, mais le résultat reste
en quelque sorte insaisissable. Ou mieux : c’est le résultat qui
me saisit, à ma propre surprise.
Ou
est-ce que je me trompe ? C’est bien possible que ce que j’appelle
des révélations ne le sont point. Alors, faut-il les démystifier ?
J’en suis pas sûr. J’aime trop mon petit pays de merveilles dans
mon coeur, qui se trouve entre ma cour de récré et ma cuisine
intérieure. J’en suis même dépendant, comme je suis dépendant
du taf d’ailleurs. Et finalement, j’aime bien les mythes. Ça
fait rêver.
Fabian
Keijzer
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