vendredi 15 février 2013

ROND & CARRÉ #3


Voyager permet de lire et de réfléchir. Le jour va venir où je consacrerai un billet entier à un éloge du TGV Paris - Montpellier. En toute sincérité, c’est un de mes lieux préférés en France.

C’est donc dans ce train que je viens de lire un magazine qui s’appelle « TGV Magazine ». Bref, un pseudo-glossy avec zéro prétention, mais pourtant, je suis tombé sur deux articles qui m’ont troublé. Moi, qui me définit, selon les jours, comme « pas très croyant » ou simplement « protestant libéral ». Car justement, c’est de liberté et de religion qu’on parle.

Ça commence avec un entretien avec Marjane Satrapi, artiste et cinéaste franco-iranienne. On lui pose la question : « D’où vous vient votre esprit libre ? » Réponse hallucinante : « J’ai eu une éducation totalement en dehors de religion. J’ai été élevée par des gens qui ont su développer chez moi un sens éthique - pas un sens moral - et qui m’ont toujours poussée à avoir une pensée personnelle. »

D’accord, l’Iran n’est pas le pays modèle où religion et liberté vont main dans la main. Mais ce qui m’énerve, c’est que – si on suit cette argumentation – les croyants sont a priori définis comme des moutons sans trop de pensées personnelles. Sans pour autant vouloir fermer mes yeux sur les dérives, et avec le tout petit peu de foi qui est le mien, je revendique une force libératrice et émancipatrice que la religion peut apporter aussi. Et je suis obligé de défendre cette affirmation, car j’avoue qu’elle a souvent besoin de pédagogie pour être bien comprise...

On tourne la page du magazine pour trouver un entretien avec Sophia Aram, comédienne et chroniqueuse sur France Inter, que j’apprécie beaucoup. Mais avec toute l’estime et le respect que je lui dois : on continue les bêtises ! Je cite : « En tout cas, on peut être sûr que Dieu n’est pas une femme. (...) Les trois grandes religions monothéistes n’arrivent pas à se mettre d’accord sur grand-chose. À part la place de la femme dans la religion... et l’homosexualité ! »

N’importe quoi, chère Sophia ! Vous l’aurez compris, j’ai quitté le TGV un peu déprimé. C’est pas comme ça qu’on va faire avancer les débats.

Heureusement, il y a aussi des petites merveilles pour retrouver le courage. Dépêchez-vous pour aller voir au cinéma le film Wadjda, premier film saoudien qui est réalisée par une femme, Haifaa Al-Mansour. Toutes ces grandes questions compliquées de liberté et de religion abordées par le prisme d’une petite histoire très fine. Synopsis : Wadjda, une fille de dix ans, rêve d’avoir un vélo, mais en Arabie Saoudite ce n’est pas permis aux filles de faire du vélo... Grâce a sa finesse et sa luminosité, ça donne un film puissant, qui invite à penser plus loin que le simple constat que les femmes en Arabie Saoudite sont opprimées. Le film traite la religion avec beaucoup de respect, ce qui n’empêche pas une prise de position claire : c’est la liberté, et pas la soumission, qui aura le dernier mot.

Fabian Keijzer

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