lundi 29 octobre 2012

Théologie en Hongrie

Je vous écris de Sarospatak. J'ai visité ce matin une des quatre facultés de théologie hongroises. Fondée en 1531 et réouverte en 1990 après l'ère communiste, elle est installée dans un bâtiment historique : le prince Ferenc était acquis à la Réforme calviniste au seizième siècle. Le professeur d'histoire nous a fait visiter la bibliothèque : incunables, écrits en latin datant des débuts de la Réforme, traductions d'ouvrages littéraires (j'ai vu un magnifique livre illustré de Victor Hugo dans une des vitrines), éditions annotées de la Bible dont un tome superbe d'une édition en hébreu, grec, latin et hongrois, constituent le fonds ancien. Dans la partie plus moderne voisinent des ouvrages en hongrois et en anglais. De nombreux chercheurs viennent chaque année travailler ici. Quant à la faculté proprement dite, elle compte environ 60 étudiants régulièrement inscrits (chercheurs et futurs pasteurs de l'Eglise réformée) et plus d'une centaine d'étudiants par correspondance et en parcours aménagé. La taille de l'institution, le style d'enseignement et l'ambiance me rappellent l'IPT.
On enseigne ici toutes les disciplines de la théologie. La professeur qui m'héberge enseigne notamment l'histoire de la dogmatique. Elle m'explique qu'elle trouve passionnant de partager avec les étudiants l'évolution de la théologie, toujours à comprendre à nouveaux frais. La place de l'imagination en théologie est donc toujours d'ouvrir la réflexion, de renouveler pour aujourd'hui ce dont d'autres ont eu l'intuition. On actualise en permanence, pour le monde et les préoccupations d'aujourd'hui. 



Elle est également responsable du programme Erasmus. On suit ici le système LMD, comme chez nous. Ca signifie que les cours peuvent être suivis par des étudiants originaires d'autres pays que la Hongrie. Les professeurs, outre le hongrois, parlent l'anglais, parfois l'allemand ou le hollandais. Mon guide de ce matin parlait un excellent français. Parmi les cours donnés en anglais, on trouve un cours sur la spiritualité postmoderne, sur le concept de Dieu dans la trilogie d'Ingmar Bergman, sur la théologie morale de Dietrich Bonhoeffer ou encore sur les défis ecclésiologiques dans l'Eglise réformée hongroise (pour plus d'informations, voir sur le site de la faculté de théologie, programme Erasmus). Nous rêvons ensemble à la possibilité d'échanges entre nos facultés : échange d'étudiants, échanges de professeurs, conférences... Pourquoi pas ? Ce sera aux collèges des enseignants de s'emparer de cette question, en tout cas le fait que l'IPT fasse à présent partie du programme Erasmus pourra faciliter les choses. Ce que mes voyages m'ont appris, c'est que le contact avec des théologiens du monde entier permettent de reformuler nos propres prises de position. On voit mieux que la systématique, c'est vraiment avoir affaire à un système : quand on essaie d'intégrer à son propre positionnement des idées venues d'ailleurs, ça fait nécessairement bouger l'ensemble et il faut travailler sur la globalité pour que chaque élément prenne sa place. En ce sens, tout théologien est systématicien. Mais aussi historien, bibliste, praticien... Ce n'est pas un hasard si pendant longtemps, la théologie était la reine des disciplines, celle qui couronnait toute une éducation. 
Le dialogue entre théologiens n'est pas qu'un dialogue entre cultures. Encore que ce soit un aspect tout à fait agréable de ce voyage que de partager un bon vin (Tokay est tout près d'ici) ou de délicieux gâteaux hongrois au coin de la monumentale cheminée en céramique !
PRG

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